Si Messiaen a depuis sa première oeuvre pour orgue révolutionné la musique écrite pour cet instrument, la Messe de la Pentecôte marque un premier tournant esthétique. Ecrit en 1950, ce cycle d’environ une demi-heure, est sensiblement plus difficile d’accés que la première partie de son oeuvre. Celà se traduit, par une musique moins legato, plus dissonnante, et également plus recherchée sur le plan des timbres. On ressent aussi une économie de moyen (une rendu sonore moins chargé) par rapport aux autres oeuvres. Il en résulte quelque chose de très efficace : au lieu de grandes fresques extrêmement colorées auxquelles il nous a habitué, les rares arcs en ciel ici présents baignent dans espace noir et profond, traversé par de grandes lignes lumineuses. Le mélange des timbres, leur enchaînement est également d’une grande inventivité et efficacité : rien ne semble ici gratuit, mais au contraire couler naturellement. Le final constraste utilement avec le reste de l’oeuvre, par son côté toccata. Vous l’aurez compris, ce cycle est une pièce importante de l’orgue du XX° siècle.
Louis Thiry en donne une interprétation qu’il est permis de trouver définitive. Une compréhension totale de cet univers, alliée à une prise de son sans équivalent (l’enregistrement date pourtant des années 70), contribuent à rendre ce disque indispensable.
Le Livre d’orgue écrit en 1951 fait partie des rares œuvres où Messiaen cède aux stérilités avant-gardistes des années 50 (et dans son corpus pour orgue il s’agit du seul exemple). On pourra donc passer sans regret sur cet opus.
Mais non, mais non, il ne faut pas renoncer au Livre d’orgue, en tout cas si on s’intéresse à Messiaen dans son ensemble. Ca permet de bien se représenter son positionnement idéologique, résolument du côté de l’exploration de moyens nouveaux.
Après, est-ce qu’on est obligé de l’écouter en entier, pas forcément en effet. 🙂
[Magnifique coquille dans la dernière phrase – il m’a fallu quelques instants pour voir de quoi tu voulais parler.]
J’ai écouté, par curiosité. Je n’y vois aucun intérêt musical, le seul qui vaille pour moi. L’intérêt historique dont tu parles … pourquoi pas, mais c’est l’affaire des musicologues ça.